France Alzheimer Rhône et l'Espace éthique lancent une enquête locale auprès des aidants

Mieux comprendre comme concilier les exigences d’une activité professionnelle avec les contraintes et valeurs du soignant familial

Publié le : 26 Avril 2016

L'enquête sur le site de France Alzheimer Rhône

Présentation des enjeux

L’espérance de vie ne cesse d’augmenter et une population croissante profite d’une vieillesse avancée. Cette tendance s’accompagne corrélativement d’une forte progression de certaines pathologies, neurodégénératives notamment, et, globalement, d’une prolongation de « la vie malade ». Malgré la professionnalisation des services du soin à la personne, les familles assurent encore et toujours une part importante de la prise en charge. Être un « aidant familial en activité » est aujourd’hui une situation courante à laquelle tout un chacun peut un jour d’être confronté.

Prenons le cas des patients atteints par la maladie d'Alzheimer : les études montrent que le soutien qui leur est apporté induit souvent un épuisement tant physique que psychologique des aidants. Ceux-ci éprouvent le sentiment de faire de lourds sacrifices dans leurs propres vies, en ayant de moins en moins de temps pour eux-mêmes, pour leur famille et pour leurs activités extra-familiales ou professionnelles. Cependant, l’intensification de la relation et le rapprochement entre l’aidant et le malade peut aussi être vécu positivement. Ils tentent ensemble de relever un défi. Pour autant, nous ne savons toujours pas comment les aidants et les personnes touchées par la maladie d’Alzheimer arrivent effectivement à maintenir une vie commune « satisfaisante ». Les aidants familiaux en activité, souvent le conjoint mais également les enfants et leurs partenaires de vie, sont en effet amenés à concilier leur vie professionnelle, et aussi leur propre vie familiale lorsque l’aidant est un fils ou une fille, avec le soin, très astreignant, à la personne malade.

Le législateur a d’ores et déjà mis en place un certain nombre de dispositifs prenant en compte la problématique de « l’aidant-travailleur ». Cependant, dans une approche sociologique du travail, le questionnement va au-delà d’un nouvel ajustement de la vie privée à la vie professionnelle. Il faut en effet rappeler que le travail réalisé en dehors de la sphère familiale est au centre de notre vision du monde depuis le XVIIIe siècle. Il structure l’emploi du temps des actifs ainsi que de leurs familles car c’est bien l’argent gagné au travail qui permet d’assurer la reproduction de la cellule familiale. De plus, le travail témoigne de l’utilité et de la place de chacun dans la société. Il est fondamentalement une source de reconnaissance sociale qui peut en outre être considéré comme un moyen d’expression et de réalisation de soi.
Avec la probabilité croissante de devoir accompagner une personne proche vers sa fin de vie, ne faut-il pas aujourd’hui interroger le rapport au travail dans notre société ? Le souci de l’autre que l’aidant éprouve au jour le jour, le sentiment d’être utile pour la personne malade qui se rattache au vécu ne pourraient-ils pas questionner la place occupée par le travail ? Le moment du soin n’incarne-t-il pas un fort potentiel de réalisation de soi ? A contrario : le travail ne devient-il pas aussi un indispensable moment de « répit » pour l’aidant ? Et si tel est le cas, comment et en quoi cela modifie-t-il sa représentation du travail, ses rapports aux collègues ainsi qu’à la hiérarchie ? Comment arrive-t-il à concilier les valeurs de l’entreprise et ses objectifs professionnels avec ses propres valeurs et objectifs en qualité de soignant ? Quelle conscience le management de l’entreprise a-t-il de cette problématique et comment peut-il envisager de concilier son exigence de compétitivité économique avec la prise en compte de ce fait sociétal ?

Autant de questions que cette étude sociologique intégrée au projet « Etre Aidant Familial en Activité » engagé par France Alzheimer Rhône en 2016 se propose d’aborder.