SLA et acceptation de la vie : Un témoignage

"Bien des gens nous disent que nous sommes une famille exceptionnelle. Certes, cela nous flatte mais c’est loin d’être la réalité. Car sans l’aide et le soutien dont nous bénéficions, nous aurions sombré dans le désespoir. Mais grâce à cet appui, nous avons pu nous détendre, nous avons eu l’occasion de souffler un peu et de devenir ce que nous sommes aujourd’hui, malgré ou peut-être en dépit de la SLA."

Publié le : 23 Septembre 2015

Je suis mariée et mère d’une fille merveilleuse. A 28 ans, une sclérose latérale amyotrophique (SLA) m’a été diagnostiquée, ce qui fut un choc pour toute la famille. Au début, nous étions désespérés et nous sommes partis à la recherche d’un médecin susceptible de réaliser le miracle de me guérir, contrairement à tous les pronostics. Ensuite nous avons décidé de ne plus mettre la maladie au premier plan, mais de privilégier notre petite famille. Comme j’allais bientôt succomber à ma maladie (normalement, l’espérance de vie moyenne est de 3 à 5 ans), je n’entendais pas gaspiller le temps qui nous restait par des dépressions ou des lamentations. Mais ceci n’était que pure théorie, car j’étais bien obligée de constater que mes proches s’effondraient sous le poids des soins chaque jour plus compliqués qu’il fallait me prodiguer. Je me demandais si ma volonté de vivre justifiait les souffrances de ma famille. Fallait-il que je désire ma propre mort afin de soulager ma famille bien-aimée ?
D’une façon ou d’une autre nous avons toujours trouvé la force, et surtout l’obstination, de ne pas arrêter d’adresser des lettres aux autorités responsables. Étaient-ce nos arguments ou notre persévérance qui ont fini par nous ouvrir les portes ? En tout cas, j’ai eu la possibilité – vitale pour moi – de continuer à vivre à la maison avec ceux que j’aime et de me faire soigner par des personnes de confiance. En fait, il me faut bénéficier du concours de personnes disponibles 24 heures sur 24 et qui me comprennent également sans l’aide de ma synthèse vocale. Il est évident que notre vie familiale a radicalement changé du fait de la présence permanente de tiers. Mais sans eux, nous n’aurions plus aucune vie de famille. Alors …
Ce n’est qu’en disant « oui » à la vie dans son for intérieur que l’on peut bénéficier de moments de bonheur. Au fil du temps, les méditations quotidiennes m’ont permis de parvenir à la paix intérieure. N’est-ce pas une grâce que de pouvoir travailler sur sa propre conception de la vie et de considérer sa vie comme précieuse ? Et c’est surtout en cas de maladie dégénérative et incurable que cette acceptation de la vie a un effet fortement stimulant sur nos forces intérieures.
Voici l’une des conclusions majeures que j’ai tirées de mes 15 années avec la SLA. Les médecins, les naturopathes, les thérapeutes ou les médicaments peuvent certes aider ou soulager, mais chacun d’entre nous est personnellement responsable de son propre bien-être. Chacun d’entre nous a subi des coups du sort plus ou moins graves. Mais dans notre for intérieur, nous pouvons décider librement et de façon autonome si nous entendons concevoir notre vie dans le rôle de celui qui agit activement ou plutôt dans celui de la victime impuissante.
Bien des gens nous disent que nous sommes une famille exceptionnelle. Certes, cela nous flatte mais c’est loin d’être la réalité. Car sans l’aide et le soutien dont nous bénéficions, nous aurions sombré dans le désespoir. Mais grâce à cet appui, nous avons pu nous détendre, nous avons eu l’occasion de souffler un peu et de devenir ce que nous sommes aujourd’hui, malgré ou peut-être en dépit de la SLA. L’association « Wäertvollt Liewen » a été fondée en février 2012 par mon mari, des amis et moi-même, pour permettre à d’autres eux-mêmes concernés de devenir également des « personnes ou familles d’exception ». Notre objectif, c’est la création d’un réseau national de référence et de compétences pour les personnes atteintes de SLA ou de pathologies similaires. « Wäertvollt Liewen » se consacre à une amélioration permanente des conditions de vie des personnes concernées, notamment dans le contexte de l’encadrement 24 heures sur 24 à domicile par des tiers.